Temps de lecture estimé à : 8 minutesDeadly Class chez Netflix, adaptation d’un comics indé punk et cynique

Temps de lecture estimé à : 8 minutes

Deadly Class est l’un de mes comics préférés. En France, il se trouve dans la catégorie Indie d’Urban Comics, et présente un univers sombre et punk. Alors quand la série télé a été annoncée par Syfy, j’ai été aussi impatient qu’un enfant qui attend Noël. Malheureusement, Deadly Class ne connaitra pas de saison 2, malgré la qualité de la série. Mais pas de panique ! Netflix a repris les droits, et qui sait ? Peut-être qu’un jour nous aurons la suite. Dans tous les cas, il est temps de revenir sur l’oeuvre télévisée, qui n’a rien envié à Umbrella Academy.

Deadly Class, c’est une œuvre un peu particulière, et je vais essayer de l’aborder sans spoiler. Pour celleux qui ne connaissent pas, le comics se centre autour de Marcus. C’est un adolescent SDF qui survit au jour le jour durant la fin des années 1980 sous Reagan. Alors que Marcus pense à mettre fin à ses jours, il rencontre Saya. De fil en aiguille, Saya introduit Marcus à son école un peu particulière : Kings Dominion. On y forme les futures élites au meurtre. Rien que ça.

Si le résumé semble très edgy avec un personnage central torturé, le comics établit surtout une critique sociale et apporte un point de vue assez désespéré sur la société. Marcus est un adolescent de quatorze ans, que j’ai trouvé pour ma part crédible, mais qui mériterait parfois des baffes. Le comics a un style qui sort du lot, assez nerveux, et surtout avec des cases dignes d’un storyboard. Cependant, comme annoncé dans l’introduction, je vais surtout parler de la série TV que j’attendais au tournant

Deadly Class, une teen-series ?

Vous avez le coeur bien accroché ? Et vous aimez les oeuvres cyniques ? Je vous conseille d’y jeter un oeil ! Contrairement au comics qui va à du 200kmh, la série n’hésite pas à poser plus amplement ses personnages. Elle a surtout des allures d’univers étendu.

On y suit un peu à la manière de Harry Potter, les étudiants de Kings Dominion entre leurs cours et leurs aventures extra-scolaires. Bien vite, on retrouve les clichés habituels du teen movie, parodié et plus acide dans le ton. Marcus fait partie des « outsiders », s’opposant aux jocks et aux filles populaires. Je pense que beaucoup de personnes peuvent se reconnaître dans chacun des personnages. Ceux-ci sont diversifiés.

Les personnages centraux de la série Deadly Class

C’est d’ailleurs un point important de l’œuvre. L’introduction que fait Billy au réfectoire en est une preuve ! Il fait remarquer à Marcus que les tables se séparent entre communautés ethniques. Nous avons d’un côté l’élite blanche qui flirte sans se cacher avec le KKK. Mais aussi le groupe d’Afro-Américains, le clan de yakuzas, ou le gang de mexicains, etc.

Tout d’abord, l’aspect communautaire au sens large  se profile constamment dans la série télé. Nous avons des adolescents qui se cherchent, et font face au besoin d’appartenance, avant même de chercher à se faire des amis. Puisque Marcus arrive en cours d’année, il connaît ce vide d’être l’élève marginalisé, jusqu’à s’incruster justement dans le groupe des outsiders. C’est Billy – mentionné plus haut – qui l’y introduit. Avec son air punk, et ses blagues issues de la culture du Jeu de Rôle (diabolisé à cette époque), c’est son point d’accroche.

Des personnages hauts en couleur

Bien vite, Marcus devra collaborer avec Willie, l’héritier d’un gang dont le père est mort sous ses yeux. Si dans le comics leur relation est très forte, c’est un peu de dommage de voir qu’elle ne s’envole pas réellement dans la version télévisée. Willie est un personnage intéressant, dont le développement m’a donné des frissons durant ma lecture du comics. Dans la série TV, il est mis en arrière-plan pour privilégier Maître Lin.

Sans spoiler – je fais des efforts ! -, Maître Lin est le directeur de Kings Dominion. Dans le comics, c’est le cliché du sensei rigide. Dans la série TV, Benedict Wong tient son rôle (Wong dans Doctor Strange, rien que ça !) en duo avec sa sœur qui n’existe pas dans le comics. Malgré tout, j’ai apprécié les nuances apportées à son personnage, et le drame qui le concerne. Une grosse partie de l’intrigue de la saison 1 se déroule autour de lui, alors que dans le comics, son implication réelle arrive tard.

Vous l’aurez compris, Deadly Class met en avant des personnages bien écrits, avec leurs défauts et leurs forces. Dans le comics, leur développement est souvent mis en second plan, mais j’ai apprécié que la série TV aille plus loin. Le personnage de Lex sert de ressort comique, comme Billy, mais cela fait du bien entre les drames que nos protagonistes vont traverser tout du long de cette saison 1.

Mention spéciale pour Maria, dont l’actrice est littéralement le personnage. Dans la bande dessinée de Deadly Class, je me suis vite entiché d’elle, mais dans la série TV, elle crève l’écran. C’est une jeune fille forte, ayant connu un passé dur, et passant par une phase de dépression intense et alcoolique. On peut comprendre aisément pourquoi le coeur de Marcus va balancer entre elle et Saya – que j’ai appris à aimer. Elles sont en vérité deux figures emblématiques sur les deux supports. Clairement, elles lui volent plusieurs fois la vedette, et forment un duo complexe et de choc.

La série TV Deadly Class est-elle une bonne adaptation ?

Même si la série TV prend des libertés avec le comics, l’un des points que j’ai vraiment appréciés, c’est les personnages qui sont respectés que ce soit dans leurs personnalités et leurs physiques. Si Marcus est décrit comme un beau gosse dans le comics, cela ne l’empêche pas d’être plein de cicatrices et de connaître des passages humiliants.

La série ne s’allège pas, les cicatrices sur le visages ne disparaissent pas, et le fameux passage dans les toilettes de la boutique de comics non plus. Les acteurs ressemblent aux personnages du comics, Saya garde ses tatouages dans les deux formats, Billy sa crête, etc.

Côté mise en scène, si l’on peut reprocher la lenteur de la série TV (les cinq premiers épisodes englobent que le premier tome), force est de constater qu’on sent que le format de base était une bande dessinée. C’est assez stylisé, nerveux, et mention spéciale pour l’épisode 5 (justement) que j’attendais au détour.

Je dirais que c’est à partir de celui-ci que tout bascule pour les personnages, et j’avais peur qu’il s’en retrouve édulcoré. Pas du tout ! La série joue avec les différents formats, et appuie sur le drame de la situation. Deadly Class est une oeuvre cynique, et j’ai aimé retrouver cela dans la série TV. Évidemment, la part belle revient à la bande-son qui contextualise l’oeuvre. Dans le comics, les personnages parlent souvent de musique. Cela est mis tout aussi en avant dans la version télévisée.

Et les personnages queers dans Deadly Class ?

Et le côté queer ?

AH.

C’est un point d’avantage développé dans le comics, mais je ne vais pas trop en parler pour vous laisser la surprise. Néanmoins, la série télévisée fait souvent allusion à la sexualité des personnages.

Il y a quelques passages où Billy et Lex flirtent avec la bisexualité sans que cela soit réellement assumé. En surface, la série aborde la question de l’homophobie intériorisée avec le personnage de Victor. Celui-ci est un héritier russe, raciste, homophobe, qui passe son temps à vouloir dominer ses camarades masculins.

Malheureusement, si le comics l’aborde plus en profondeur, la série TV s’arrête aux blagues de Billy sur l’homosexualité refoulée de Victor.

Enfin, l’humour dans Deadly Class est souvent noir. On rie de son malheur, ou de choses qui ne prêtent pas ordinairement à cela.

Les personnages dangereux, comme FuckFace se ridiculisent. D’ailleurs, FuckFace est une caricature du redneck raciste. Il est trash et odieux, et sera l’un des antagonistes principaux de la série – au moins, il n’est pas queer-coded.

En conclusion, mon avis sur l'adaptation :

Eh voilà ! J’en dirais plus sur la bande dessinée, lorsque j’aurais enfin entre les mains le dernier tome qui ne devrait pas tarder ! Il est sorti le 26 Octobre en version anglaise, et j’ai hâte de voir la conclusion…

Même si je pressens que j’aurais un goût de trop peu. Pour moi, c’était l’occasion surtout de vous encourager à visionner la série, mais je sais d’avance que si vous avez accroché, la fin de la saison 1 risque d’être particulièrement frustrante.

Dans tous les cas, Deadly Class n’est pas une série comme les autres, et elle n’est pas à mettre entre toutes les mains. Pour la petite histoire, quand j’étais encore libraire, j’ai eu une cliente particulièrement pénible et méprisante. Celle-ci voulait une oeuvre pour « apprendre la vie » à son petit-fils de 14 ans. Un peu désespéré, je lui ai alors parlé de Deadly Class, et surtout : je lui ai raconté la fin du premier volume. Elle me l’a acheté. Peut-être que j’ai traumatisé un ado, qui sait ?

D’abord, je ne dis pas que ce genre d’oeuvre s’adressent exclusivement aux adultes, loin de là ! En outre, ce n’est pas une lecture ou un visionnage dont les adolescents en sortiront indemnes. Bref ! Je vous dis à bientôt un dossier digne de ce nom pour Deadly Class !

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